Rogozine et Savelyev: leur avis sur les projets américains dans l’espace

A droite, Sergueï Savelyev et Dimitry Rogozine lors d'une rencontre à Moscou le 26 octobre 2020. Image d'archives.

Dmitry Rogozine et Sergueï Savelyev, respectivement DG de Roscosmos et responsable de la coopération internationale à Roscosmos, ont participé à la table ronde "Politique américaine dans le domaine de l'exploration spatiale".

Voici quelques extraits de ce qu'ils ont déclaré.

Le directeur général de Roscosmos, Dmitry Rogozine, a exprimé des doutes quant à la mise en œuvre du programme lunaire Artemis, lancé par les États-Unis, au moins sous sa forme actuelle.

"Je ne crois même pas vraiment au programme Artemis, car à bien des égards, ce programme lunaire était celui de Donald Trump était plus conçu pour la politique intérieure. C'était un élément de démonstration de la force du Parti républicain".

Le chef de Roscosmos doute également que les démocrates des États-Unis vont s'engager dans ce programme. "Au moins, je suis sûr que les accents seront réglés différemment", a-t-il déclaré.

[Rappelons qu'au printemps 2019, la NASA a annoncé le projet du programme lunaire Artemis, qui comprendra trois étapes. Le premier d'entre eux (Artemis 1) prévoit le vol sans pilote du vaisseau spatial Orion installé sur la fusée Space Launch System autour de la Lune et son retour sur Terre. La deuxième étape (Artemis 2) est un vol autour d'un satellite naturel de la Terre avec un équipage à bord. Dans la troisième phase de la mission (Artemis 3), la NASA prévoit de faire atterrir des astronautes sur la Lune en 2024, puis de les envoyer sur Mars vers le milieu des années 2030. La première étape du programme est prévue pour 2021, la seconde pour 2023.]

Le chef de Roscosmos Dmitry Rogozine a proposé à la NASA de financer la création d'un port d'amarrage compatible avec le vaisseau spatial russe [Orël - NDLR NK] à la station lunaire américaine, afin que, si nécessaire, les Russes puissent secourir l'équipage américain.

Rogozine a noté qu'il avait fait une telle offre au directeur de la NASA, Jim Bridenstine. "J'ai dis: écoutez, bien sûr, vous pouvez orienter vos idées dans des directions différentes, mais vous devez simplement laisser une porte ouverte, c'est dans votre propre intérêt, les intérêts américains, les intérêts vitaux de votre équipage. Un port d'arrimage qui sera adapté pour que, si nécessaire, nous puissions approcher et arrimer notre vaisseau et récupérer votre équipage et retourner sur Terre". "Autrement dit, si quelque chose arrive soudainement à l'engin spatial américain Orion et à son équipage en orbite lunaire, personne sauf la Russie, et personne, sauf, je l'espère, la Chine, ne pourra sauver l'équipage américain à l'avenir".

Pour ce qui est de Savelyev, celui-ci pensent que les États-Unis pourraient essayer de mettre en œuvre des programmes militaires sur la Lune avec une coalition de partenaires.

Cela a été annoncé lundi par le directeur général adjoint de Roscosmos pour la coopération internationale, Sergueï Savelyev, lors de la même table ronde au Conseil de la Fédération sur la politique américaine dans le domaine de l'exploration spatiale.

Selon lui, les principes des accords développés dans le cadre du programme lunaire américain "Artemis" violent directement ou indirectement les normes du droit international de l'espace, en particulier, il n'y a pas d'interdiction directe des activités militaires sur la Lune.

"Ainsi, à notre avis, nos collègues américains n'excluent pas la militarisation de l'espace, si nécessaire. C'est cette formulation cachée qui inquiète en général, et attire également le plus grand nombre d'investissements et de partenaires vers le programme lunaire américain Artemis », a déclaré Savelyev.

[Au bilan on apprend donc que la Russie ne compte pas participer de façon majeure au "Gateway" lunaire américain à l'exception du financement d'un port d'arrimage pour son vaisseau Orël].

Sources: TASS, TASS et TASS