Retour en schémas sur la future station de service russe (ROSS)
A kosmosnews.fr nous n'aimons pas trop écrire sur les projets spatiaux à long terme car l'Histoire nous montre très souvent que les prédictions se révèlent fantaisistes et les projets trop futuristes jamais réalisés.
Néanmoins il est intéressant de se faire une idée de ce qui prendra forme à moyen terme, disons d'ici 10 ans.
Aussi nous revenons sur le projet de station spatiale russe ROSS, d'autant que la situation géo-politique actuelle, lui donne encore un peu plus de sens.
Le second numéro de l'année 2022 de Roussky Kosmos est revenu sur ce projet et a proposé quelques illustrations qu'on a plaisir à partager.
Le projet est divisé en 2 phases temporelles de déploiement.
La première a comme caractéristique d'utiliser pour transporter hommes et fret avec les vaisseaux utilisés actuellement: Soyouz MS et Progress MS.
Le premier module qui devrait être lancé, au alentour de 2026, sera le module NEM adapté à sa nouvelle destination puisqu'il était initialement prévu pour l'ISS. Ce module (à gauche sur l'image), dit d'Energie et Scientifique (NEM pour Naouchno-Energuetichesky Modoul, est de conception nouvelle pour la Russie, s'éloignant drastiquement des modules de l'ère soviétique des Salyout-Almaz, Mir et ISS. Il comprendra, comme on peut le voir sur le schéma ci-dessus, une partie pressurisée (partie blanche de droite) et une partie non-pressurisée comprenant les panneaux solaires.
Le second module à rejoindre ROSS sera un module universel de liaison (Ouzlovoï Modoul), similaire à Prichal sur l'ISS, comprenant 6 ports d'arrimage comme sur ce dernier, mais dont la structure sera renforcée car il jouera un rôle central et permanent pour ROSS.
Le troisième module devrait être le module dit de base (Bazovy Modoul) qui donnera plus d'espace aux cosmonautes durant leur séjour, ROSS ne devant être visitée et non habitée dans le sens où il n'y aura pas une présence humaine permanente. Les cosmonautes ne seront présents que quand cela nécessaire pour installer ou réparer des équipements, ou bien réaliser certaines expériences nécessitant leur intervention.
Le quatrième module sera un module sas (Shlyouzovoï Modoul) permettant les sorties extra-véhiculaires.
La réalisation pratique de cette première phase nécessite la réalisation des points suivants:
- que le lanceur Angara A5M soit disponible et puisse être lancé depuis Vostochny (toutes les opérations de ROSS seront réalisées depuis ce cosmodrome, en territoire russe). Le pas de tir, actuellement en construction devrait être opérationnel au début de 2024.
- que le module NEM soit adapté à sa nouvelle fonction. Le point le plus nouveau sera d'y installer le système de maintien de l'attitude (gyroscopique) et de contrôle global qui n'était pas prévu dans le cadre de l'ISS.
- que les autres modules soient progressivement développés.
Une fois réalisée le volume pressurisé atteindra 228 m3, la puissance électrique 55 KW, la capacité d'ergols près de 4 T, la liaison avec la Terre jusqu'à 105 Mbits/s.
Tout cela permettra la vie d'un équipage de 2 cosmonautes avec un vaisseau pouvant rester attaché à ROSS jusqu'à 1 an et cargo jusqu'à 2 ans.
La seconde phase de construction de ROSS repose sur un changement, bien que non obligatoire, de moyens de transport des hommes et du fret. Soyouz et Progress sont remplacés par un dérivé du vaisseau dit lunaire, Orël, revu à la baisse en terme de masse, et pouvant aussi permettre le retour de fret depuis la station. Il est possible d'ailleurs que le dérivé soit le premier opérationnel, tant une expédition russe vers la Lune semble s'éloigné à court terme.
Dans le même temps la station ROSS devrait gagner deux modules dit "cibles" (c'est-à-dire destiné à des usages pratique à définir le moment venu), Tselovoï Modoul, et une plateforme de service des satellites, Platforma Obslouzivania KA, dont le nom indique la fonction.
Le volume de ROSS attendra alors 667 m3 dont 49 m3 pour les équipements cibles. La masse des ergols (UDMH et AT) atteindra plus de 9 T, la vitesse de transmission des données 300 Mbits/s, le nombre de résidents pouvant, si nécessaire être monté à 4 bien que l'on prévoit une exploitation avec seulement 2 cosmonautes et pas en permanence. La présence du vaisseau/cargo attaché à la station pouvant aller jusqu'à 2 ou 3 ans.
Les lancements vers la station, qui devraient être placée sur une orbite presque polaire, pourront se faire depuis Vostochny, voir Plesetsk.
En résumé, ces schémas et les indications données montrent clairement le chemin souhaité par la Russie en matière de station spatiale: elle devra être plus automatique et donc servie par moins de cosmonautes. Il faut retenir surtout qu'elle devra être plus efficace (survoler l'ensemble du territoire russe) et moins chère (les financements devraient être redirigés vers la constellation de satellite Sfera et les sondes spatiales lunaire et interplanétaires.
Sources et crédits d'illustration: Roussky Kosmos/Roscosmos