L’évènement: l’annonce de la Station Lunaire de Recherche Internationale sino-russe et la publication du guide pour les partenaires
La volonté de la Russie, devant les sanctions américaines et le peu d'enthousiasme des USA à poursuivre une coopération sur les bases de celles de l'ISS, de chercher de nouveaux partenaires spatiaux n'est pas vraiment nouvelle ces dernières années.
Néanmoins jusqu'ici la coopération avec la Chine s'était limitée à des échanges commerciaux de technologies spatiales dans le domaine des vols habités comme par exemple les scaphandres des taïkonautes.
C'est pourquoi on regarde toujours avec circonspection les annonces de coopération entre les deux pays.
Pourtant cette fois-ci, les annonces sont plus concrètes et réalistes.
La Chine et la Russie ont pris la décision d'initier un projet portant sur une Station Lunaire de Recherche Internationale, soit en anglais l'acronyme ILRS.
Là où le projet semble sérieux c'est que les deux pays ont, à l'occasion du GLEX 2021, publié la guide du partenariat de ce projet.On trouvera ce guide ici en téléchargement.
La lecture (en anglais) de ce guide montre le réalisme du projet. Plus encore il ouvre ce projet à la participation d'autres pays et en définit les conditions. C'est ici qu'il fait la différence avec le Gateway américain: là ou le projet américain est largement sous la direction des USA, l'ILRS met les différents partenaires à égalité.
De plus ce qui paraît intéressant c'est le fait que le projet paraît réaliste: il définit 3 phases dont la première (jusqu'en 2025, dénommée "Reconnaissance") est essentiellement la réunion des missions déjà programmées par les deux pays avec tout de même le partage des résultats.
La seconde phase, elle (à partir de 2026), est la phase, dite de "Construction" où les missions seront de vraies missions communes, d'abord avec les missions Chang'E 8 et Luna-28 où les deux pays interviendront dans la mise au point, bien que ces missions aient déjà, en partie, été prévues. Ensuite viendront des missions ILRS-1, puis ILRS-2 etc, qui seront de vraies missions communes.
Il est à noter que le projet comprend à la fois des missions sur et autour de la Lune, afin d'établir des bases solides pour construire une présence humaine sur notre satellite.
Une troisième phase dite "d'Utilisation" au-delà de 2035 devrait développer ce projet.
Dans le guide de partenariat il est défini 5 niveaux de participation (de A à E) au projet pour les pays qui souhaiteraient y prendre part.
Que peut-on penser ce cette initiative? Clairement elle vise aussi à faire pression sur les USA, et leur nouveau président, pour, peut-être qu'au final, les deux projets fusionnent comme cela avait été fait au moment des projets MIR-2 et Freedom de la Russie et des Etats-Unis.
Néanmoins les conditions politiques sont bien différentes. Les USA ont toujours l'illusion qu'ils pourraient regagner leur hégémonie mondiale alors que Chine et Russie souhaitent un monde multipolaire et leur disputer une partie au moins de cette hégémonie.
Les conditions politiques sont en effet bien différentes de celles des années 90 où la Russie était faible et la Chine pas encore totalement puissante économiquement.
Pour une fois on citera le président Poutine, qui dans ce domaine avait raison et qui disait en substance " On ne nous aime bien que lorsque nous sommes faibles [donc docile]"...
Sources: Roscosmos et Roscosmos; Illustrations graphiques: Roscosmos et CNSA