Rencontre Rogozine – Poutine: Roscosmos et lanceur super-lourd au menu

Vue d'artiste d'une possible configuration du lanceur super-lourd russe. crédit: www.russianspaceweb.com.

Ce 4 février le DG de Roscomos Dmitry Rogozine a rencontré Vladimir Poutine pour faire le point sur l'état économique et organisationnel de l'entreprise d'Etat la GK Roscosmos.

Rogozine a fait le point sur la réorganisation de l'industrie spatiale russe (création de holdings regroupant les principales activités spatiales - voir ici) et les mesures prises pour rétablir progressivement la profitabilité des entreprises en difficultés, au premier chef Khrunitchev. Pour plus de précisions sur ce sujet on pourra se reporter à l'article de RIA Novosti (en russe mais une traduction automatique devrait permettre d'en comprendre l'essentiel).

Plus directement intéressant pour nous, Rogozine a confirmé que l’architecture générale du lanceur super-lourd russe Yenisei était pratiquement arrêtée, que le travail sur le lanceur Soyouz-5 suivait son chemin et confirmant un premier lancement en 2022.

Précision importante: il a indiqué que ce essai en vol se ferait en même temps que le nouveau vaisseau piloté. Bien qu'il n'ait pas cité le nom du nouveau vaisseau (Federatsiya, mais que Rogozine souhaite changer) peut-on penser qu'il s'agit bien de ce nouveau vaisseau en développement chez Energuiya? Dans ce cas il faut croire que les réflexions sur une adaptation du Soyouz à des vols vers la Lune ont montré que cette option n'était pas pertinente, ne faisant pas gagner du temps et ralentissant la mise au point du nouveau vaisseau? Ou bien en ne citant pas directement Federatsiya faut-il comprendre que le "soyouz lunaire" serait alors ce "nouveau vaisseau piloté"? Ou bien encore que le choix de l'une ou l'autre des options n'est pas encore arrêté?

Concernant Yenisei, la structure générale est donc connue que l'on pourra résumer ainsi: 6 booters périphériques équipés chacun d'un moteur RD-171MV (premier étage) autour d'un corps central (second étage) de même diamètre que les booster (4,1 m) lui-même équipé du RD-180. La question reste discutée de savoir si ce moteur sera allumé au sol avec une poussée réduite à 30% ou en vol, ce qui est plus compliqué à réaliser. Également encore en discussion la séquence exacte de séparation des boosters périphériques.

Les étages supérieurs sont moins bien définis. On sait cependant que Khrunitchev s'est vu confié la mise au point d'un large étage cryotechnique (probablement utilisé sur l'Angara et donc peut-être sur l'Yenisei). Ce dernier servirait à injecter le composite supérieur vers la Lune. Enfin les manœuvres de mise en orbite lunaire (ou de sortie de cette orbite) devraient être assurées par un bloc dit "MB" constitué d'une version du bloc d'injection DM-03 d'Energuiya.

Le lanceur est donné pour 70 T en orbite terrestre et une mise en orbite lunaire de 27 T, laissant ainsi 20 T pour la charge utile comme un atterrisseur habité, ce qui est toujours très peu dès qu'on parle de l'orbite lunaire: y-aura-t-il place pour un vrai sas pour des sorties à la surface lunaire ou faudra-t-il s'en remettre à la bonne vieille méthode Apollo consistant à dépressuriser toute la cabine? En tout état de cause une mission lunaire de surface nécessitera deux lancements: un pour l'atterrisseur, un autre pour le vaisseau transportant l'équipage.

Sources: Roscosmos, TASS, www.russianspaceweb.com; crédits photographiques et illustratif: kremlin.ru et www.russianspaceweb.com

Vladimir Poutine et Dmitry Rogozine lors de leur rencontre le 4 février 2019.