Lancement de Soyouz MS-10: un problème au moment de la séparation du premier étage
Echec du lancement de Soyouz MS-10 ce matin: au bout d'environ 2 minutes de vol, soit donc au moment de la séparation du premier étage (donc des 4 boosters périphériques), le vol a été interrompu. Heureusement le système d'extraction du module de descente du Soyouz a parfaitement fonctionné et les cosmonautes sont revenus sur Terre en mode balistique sains et saufs.
Inutile de dire que ce retour balistique est quelque peu violent: presque 7 g au lieu de 3-4 pour un retour classique à la fin de mission. L'avarie ayant eu lieu dans la première partie de vol (2 minutes seulement) le retour s'est fait pas trop loin de Baïkonour, c'est-à-dire à l'est de Dzhezkazgan (non loin du village de Karazhal), soit à environ 400 km de Baïkonour (quand même !) mais dans une zone dépourvue d'habitations et facile d'accès (les steppes du Kazakhstan). Un incident qui se serait produit plus tard dans le vol aurait envoyé le soyouz dans des régions montagneuses de l'Altaï ou de Chine, beaucoup plus difficiles à atteindre. Il a fallu quand même environ 1h30 de vol pour que les hélicoptères de sauvetage arrivent sur les lieux.
Au moment de l'accident les images de l'intérieur de la cabine ont montré des secousses importantes (probablement dues au défaut technique à l'origine de l'échec du lancement ou au fonctionnement de l'extracteur de sauvetage) et les cosmonautes ont rapporté ressentir de l'apesanteur alors que cette sensation ne doit intervenir qu'à environ 9 min de vol au moment de la satellisation: clairement la capsule était en vol balistique, un peu comme lors d'un vol zéro G parabolique à bord d'un avion. Autre indication qui laissait espérer un dénouement positif pour l'équipage, on a entendu le signal radio (une sorte de bip-bip) émis habituellement lors de la fin du retour normal d'un soyouz, signal qui permet d'aider à localiser l'engin, signe que le module de descente était intact.
Rapidement les ingénieurs ont pu, d'après les données balistiques, estimer la localisation de la zone d'atterrissage, et envoyer les équipes de sauvetage, celle-ci étant située sur le parcours traditionnel des lancements soyouz. Assez rapidement les équipes en vol vers le lieu de l'atterrissage ont pu établir la communication radio avec les cosmonautes et rassurer sur leur bonne santé. Arrivés sur les lieux ils ont extraits les cosmonautes de la cabine et les ont ensuite ramenés à Baïkonour. Ils seront demain à la Cité des Etoiles (au TsPK) près de Moscou (aéroport Chkalovsky), après quelques contrôles médicaux et debriefing.
Que s'est-il passé? Il est trop tôt pour le dire de façon certaine. Ce qui paraît clair c'est qu'un problème est intervenu au moment de la séparation des boosters. L'un de ceux-ci aurait connu une avarie (problème pyrotechnique?) qui l'aurait amené à heurter le second étage provoquant sa dérive, l'extinction de son moteur et le déclenchement de la tour d'extraction d'urgence. L'analyse des données télémétriques indiqueraient qu'une valve de pressurisation ne se serait pas ouverte, provoquant la collision (la dépressurisation éloigne normalement le booster de façon à ce qu'il n'entre pas en collision avec le second étage).
Une commission d'enquête est naturellement formée (russo-kazakh), mais retenons que l'échec du lancement se termine bien à la fois pour les cosmonautes et pour les personnes au sol, puisqu'il n'a pas été rapporté de dégâts au sol alors que toute une fusée est retombée et qui plus est, dans une zone non destinée à cet effet. 24 équipes de recherche ont été dépêchées pour retrouver les différentes parties du lanceur (et le reste du soyouz).
L'échec va sans doute bloquer les lancements soyouz (Soyouz et Progress) pour quelques semaines, le temps d'identifier précisément le problème sur un lanceur extrêmement fiable qui n'avait pas connu, en ce qui concerne les vols habités, d'avarie depuis 35 ans... Paradoxalement, le lancement habité suivant (Soyouz MS-11) pourrait être avancé à la mi-novembre, l'ISS n'étant pas exploitée à sa capacité optimale avec 3 habitants seulement.
Sources et crédits photographiques: RussianSpaceWeb.com, Roscosmos, Roscosmos, NASA, NSF, Novosti Kosmonavtiki.

Les deux malheureux cosmonautes, dépités, à l'aéroport de Dzhezkazgan entouré de S. Krikalyov, D Rogozine, Y. Malenchenko et à peine visile, P. Vlassov.